Géopolitique du gaz naturel : Les pays riverains de la caspienne comme nouvelles sources d'approvisionnement de l'Europe

La région Caspienne pourrait constituer pour l'Europe une source complémentaire d'approvisionnement en gaz naturel, qui viendrait s'ajouter aux importations actuelles en provenance pour l'essentiel du nord de l'Europe (Norvège), du Nord-Est (Russie du Nord) et du Sud (Algérie, Libye). Si les pays producteurs concernés, à savoir le Turkménistan, le Kazakhstan, l'Azerbaïdjan et l'Iran, expriment leur volonté d'exporter du gaz vers l'Europe, les voies d'acheminement de ce gaz ne sont pas établies, et certains facteurs géopolitiques auront une influence sur la réalisation des investissements d'infrastructures et des contrats d'acheminement. La discorde sur le statut de la mer Caspienne, en litige depuis l'indépendance des Républiques de l'ex-Union soviétique, a créé un climat peu favorable aux accords multilatéraux, et rend très peu probable la capacité du Turkménistan à exporter son gaz vers l'Europe via l'Azerbaïdjan, sans passer par la Russie. Le plus probable est que le Turkménistan et le Kazakhstan restent dans l'orbite de la Russie, qui crée un marché commun pour le gaz, incluant également l'Ukraine et la Biélorussie. Pour un acheteur européen, acheter du gaz au Turkménistan devrait signifier acheter du gaz à la Russie, ce qui contribuera à donner à la Russie un pouvoir de négociation croissant vis-à-vis de l'Europe. L'Iran a des ambitions pour exporter du gaz vers l'Europe, et devrait y parvenir progressivement malgré la lenteur des processus politiques et industriels. Le problème principalpour l'Iran sera de s'entendre avec la Turquie pour vendre son gaz à l'Europe dans des conditions satisfaisantes. Le gaz azéri devrait pouvoir être exporté en Europe grâce à un gazoduc jumeau de l'oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan en cours de construction actuellement. L'Azerbaïdjan poursuivrait ainsi son émancipation vis-à-vis de la Russie en se tournant directement vers la Turquie et l'Europe. La Turquie devrait devenir un pays clé pour le transit du gaz de la région Caspienne vers l'Europe. Bien que confrontée à une situation d'obligations d'importation excédentaires, elle devrait être dans quelques années en mesure d'acheminer les gaz iranien et azéri, d'une part vers la Grèce puis l'Italie, et d'autre part vers la Bulgarie puis l'Autriche. Grâce au gazoduc « Bluestream » reliant directement la Russie à la Turquie en traversant la mer Noire, la Russie devrait également être en mesure d'exporter vers le sud-est de l'Europe sans passer par l'Ukraine.